Tulum est une station balnéaire de la « Riviera maya ». Elle est située à 130 km au sud de Cancún. Nous avons découvert la ville après deux heures de route. Une voie rapide rejoint les deux villes, mais la vitesse est limitée à 100 km/h et même en deçà sur certaines portions. La circulation est dense. Il y a de nombreux camions. Nous avons été ralentis par plusieurs chantiers et quelques barrages de police. Dans l’ensemble, les mexicains roulent bien au-dessus des limites. Pour ma part, je respecte scrupuleusement les limitations de vitesses, car la police est très présente et a la réputation d’user de sa position de force, pour transformer la moindre erreur sur la route en une occasion de récupérer un peu d’argent auprès des touristes (ou des mexicains). La route n’est pas très bien entretenue malgré (ou à cause) du trafic important.

L’entrée de chaque ville un peu importante est filtrée par un barrage policier. Tulum ne faillit pas à la règle. Nous sommes passés devant le barrage au pas. Nous n’avons pas été contrôlés. La route devient ensuite la rue principale de la ville. Elle est bordée par des boutiques de souvenirs, quelques hôtels de qualité inférieure, des cafés et restaurants. De part et d’autre de la route des arbres et de grandes plantes tropicales font un peu d’ombre sur les trottoirs. J’ai été frappé par le contraste avec Cancún qui donne une image beaucoup plus lisse et dont le bord de mer est encombré de nombreux hôtels de luxe. Tulum est également une station balnéaire, mais nous n’avons pas vu de grands ensembles et la misère est présente dans les rues.

En arrivant, après avoir parcouru la rue principale sur quelques centaines de mètres, nous tournâmes à gauche, dans la rue où se trouvait la résidence de notre location. Si la rue principale donnait l’illusion d’une ville bien entretenue, nous fûmes surpris par l’état de la route. De grands trous béants nous obligèrent à rouler au pas. Devant nous se trouvait un véhicule de police de type pick-up militaire, avec des barres pour que les hommes se tiennent debout à l’arrière. Plusieurs policiers, tout de noir vêtus, en casques, et fusils d’assaut en main, étaient juchés sur l’arrière du véhicule. Nous eûmes le sentiment que nous entrions dans une zone de guerrilla. Après quelques dizaines de mètres seulement, les bâtiments sur la gauche de la rue disparurent pour laisser la place à une jungle délimitée par un grillage et où étaient construites de nombreuses baraques en tôle et en bois ; un bidonville. De nombreuses familles semblaient s’entasser dans une misère qui nous surprit. Des enfants jouaient par terre. Des chiens erraient le long de la route. Des hommes nous regardaient passer. Enfin, après quelques centaines de mètres derrière le véhicule de la police, nous arrivâmes à notre résidence. Une vingtaine d’ouvriers travaillaient dans une tranchée ouverte juste devant la résidence. Une rue, en forme de piste non goudronnée, tournait sur la droite juste après la résidence. N’étant pas sûr d’être arrivé à bon port, je garai la voiture à l’angle des rues, obstruant le passage de la petite rue qui tournait à droite. Je descendis et allai à la réception pour m’assurer que nous étions au bon endroit et pour m’enquérir du lieu où je pouvais garer la voiture. Je laissai Elise et les filles dans la voiture à peine 5 minutes. Ayant eu confirmation que j’étais arrivé au lieu escompté et ayant récupéré les instructions pour le parking, je revins à la voiture. A ma grande stupeur, tous les ouvriers qui travaillaient à la tranchée s’étaient arrêtés et regardaient en direction de notre voiture. Le véhicule de police qui était devant nous avait fait demi-tour et souhaitait, comme par hasard, tourner dans la minuscule rue que je bloquais. Elise, tétanisée par le policier armé jusqu’aux dents, descendu de son véhicule, avait pris la place du conducteur pour déplacer la voiture. J’arrivai à temps pour prendre sa place et libérer la rue. Je m’excusais avec un « perdón » auprès d’eux. L’un d’entre eux me fit un signe d’acquiescement de la tête. Elise mit plusieurs minutes avant de retrouver son calme.

Dans les jours qui suivirent, nous rencontrèrent, un nombre incalculable de fois, des véhicules comparables ou des policiers en moto. Cette présence policière donnait le sentiment d’une ville en état de siège ou de guerilla. Pourtant, à aucun moment, nous n’avons ressenti de menace dans les rues. Est-ce que cette présence policière, extrêmement ostentatoire, avait précisément pour objectif de dissuader tout acte violent? Je ne saurais le dire. Mais ce qui est certain, c’est que cet étalage de forces armées m’a donné le sentiment que nous n’étions pas complètement en sécurité.

La résidence où nous avons séjourné était superbe. Elle était composée de 3 petits immeubles avec chacun une piscine à débordement sur le toit. Notre appartement, un duplex recouvert de tadelakt sur toutes les surfaces et toutes les pièces, gardait bien la fraîcheur et était joliment décoré. Deux gardiens se relayaient le jour et la nuit pour veiller à la tranquillité des lieux. Autour de la résidence, nous étions entourés par la jungle. Quelques demeures de luxe, de style comparable, se trouvaient à l’arrière de la résidence. D’autres chantiers étaient en cours. Manifestement, un programme important de construction de demeures de luxe avait été lancé depuis quelques temps.  Ces belles résidences émergeaient au milieu de la jungle, dans des rues pas encore goudronnées, et, en bordure de bidonvilles. Ce contraste entre le quartier luxueux qui progressait et les demeures misérables était saisissant.

Malgré cet environnement étrange, nous avons passé un très bon moment à Tulum. Comme je l’écris plus haut, jamais les personnes miséreuses que nous avons rencontrées n’ont exprimé d’agressivité. Celle-ci était plutôt à chercher du côté des forces de l’ordre. J’écris ces phrases sans exprimer le moindre jugement sur la situation. Nous manquons de recul pour saisir les enjeux et les risques réels encourus. Disons simplement qu’il nous a semblé que les forces de l’ordre déployées étaient disproportionnées.