Dimanche 12 août, nous avons visité le village traditionnel des Hurons-Wendat de la réserve de Wendake à moins de 20 km du centre ville de Québec.

Une réserve indienne est un territoire réservé aux « Premières Nations », régi par la « Loi sur les Indiens » et placé directement sous la juridiction fédérale. La réserve de Wendake élit le Conseil de la Nation Huronne-Wendat, formé du Grand Chef et de 8 Chefs de famille. Son territoire s’étend sur seulement 164 hectares.

Le visiteur qui arrive à Wendake découvre un territoire entièrement couvert de maisons qui lui donnent un caractère de banlieue nord-américaine typique, que rien ne permet de différencier du quartier voisin. Je n’ai pas non plus identifié de signe qui matérialise l’entrée dans ce territoire spécial.

Une seconde surprise attend le visiteur quand il est accueilli au village traditionnel par des indiens à la peau claire et aux yeux bleus (voir ici les visages du Grand Chef et des 8 Chefs de famille). Contrairement à ce que l’on pourrait craindre, il ne s’agit pas de personnels extérieurs recrutés pour l’occasion, mais bel et bien de ressortissants de la communauté de Wendake. L’explication est à chercher dans la génétique. Cette petite nation qui compte aujourd’hui environ 3000 personnes au Québec, dont une bonne part vit à Wendake, est le produit de nombreux métissages avec la population d’origine européenne.

Histoire

Lorsque les premiers contacts s’établissent entre les Français et les Hurons-Wendats, au début du XVIIème siècle, ceux-ci occupent un territoire, baptisé Wendake, de 880 km2, au sud de l’actuel Ontario, entre les actuels lacs Huron, Ontario et Erié. Leur nombre se situe entre 20000 et 25000. Ils sont en guerre avec leurs ennemis, les Iroquois.

Hurons-Wendat-territoire originel

Les Hurons-Wendat, comme toutes les populations amérindiennes sont victimes de plusieurs épidémies provoquées par les maladies apportées par les européens et contre lesquels ils ne sont pas immunisés : variole, petite vérole, rougeole, grippe… Les diminutions de population poussent les Iroquois à intensifier leur guerre contre les Hurons-Wendat pour assimiler des individus destinés à remplacer les membres disparus et compenser les baisses démographiques. Les Iroquois, armés par les Hollandais puis les Anglais disposent d’armes en plus grand nombre que les Hurons-Wendat, alliés des Français qui exercent de leur côté un contrôle plus strict de la circulation des armes. Au milieu du XVIIème siècle, la guerre est perdue pour les Hurons-Wendat. Ceux-ci se divisent en deux ensembles. Le premier ensemble, constitué majoritairement de familles traditionalistes, rejoint des tribus voisines. Ce groupe ainsi constitué sera baptisé ultérieurement les Wyandots. Après plusieurs déplacements choisis ou subis aux Etats-Unis, les descendants seront déportés dans une réserve de l’Oklahoma à la fin du XIXème siècle. De nos jours, il reste un peu plus de 300 Wyandots, vivant dans l’Oklahoma et parlant anglais. Le second ensemble des Hurons-Wendat, constitué d’environ 1000 individus majoritairement catholiques, se réfugie en 1650 vers la Baie Géorgienne (au nord-est du Lac Huron). Le froid et la faim continuent de réduire leur population. Au printemps 1650, les 300 Wendats survivants décident d’émigrer sur l’Ile d’Orléans, près de Québec. Ils sont bientôt rejoints par 300 autres réfugiés. Après plusieurs décennies de déplacements dans la région de Québec, les Wendats finissent par se sédentariser en 1697 sur le territoire aujourd’hui baptisé Wendake, en souvenir de leur origine.

Revendications territoriales

A la fin du XVIIème siècle, les Wendats installés autour du Saint-Laurent fréquentent une région allant de la Gaspésie jusqu’au Grands Lacs. « Le Nionwentsïo, signifiant le « magnifique territoire » en huron-wendat, correspond plus précisément au territoire historique principalement fréquenté par la Nation huronne-wendat au cours des siècles suivant le contact avec les peuples européens. Ce territoire est protégé par le Traité Huron-Britannique de 1760. » En vertu de ce traité, les Wendats revendiquent un droit de regard sur les projets publics « afin de tenter de minimiser l’impact du développement sur eux ».

Wendake-nionwentsio

Au-delà de ce droit de regard sur les projets de la région, les Wendats sont confrontés à l’étroitesse du territoire de la réserve qui constitue un frein à leur expansion démographique et à leur développement.

Wendake - Habitats, milieux de vie et participation sociale des

Le village traditionnel

Si le village traditionnel revêt de prime abord, les atours d’une attraction touristique destinée à générer des ressources pour la communauté, il s’avère bien plus que cela. D’ailleurs, mon envie d’approfondir la connaissance de leur Histoire et cet article en attestent. C’est une occasion pour cette communauté de raconter la terrible Histoire des Premières Nations, décimées par les maladies et les guerres et de sensibiliser subtilement le Monde sur ses revendications actuelles. Ce qui est remarquable, c’est la qualité et la douceur des personnes qui assurent l’accueil des visiteurs. Elles savent que leurs sourires et leur humour sont les principales armes qui leur restent pour continuer de faire vivre leur Histoire, leurs traditions et leur communauté.

Conclusion

Cette rencontre m’interroge sur le sens du mot « Nation », sur les liens qui font qu’une communauté humaine décide de faire vivre au travers des époques sa culture, ses traditions. Pourquoi ce jeune Raphaël, notre guide en photo ci-dessus, se revendique-t’il Wendat, alors qu’il indique avoir moins de 20% de patrimoine génétique Wendat? Est-ce sincère ou n’est-ce qu’un jeu de rôle devant les touristes? Se sent-il plus Wendat ou plus Canadien ou plus Québécois? Comment s’entremêlent ces différents héritages en lui? Est-ce que le retour des plus jeunes aux traditions ou croyances Wendat, telles que l’animisme, constaté par ce jeune Raphaël, correspond à un rejet de notre société actuelle ou à un besoin de retrouver une certaine harmonie avec la Nature?

Sources