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Hualien et la communauté Tzu Chi

Hualien est une ville qui compte environ 120.000 habitants. La ville en elle-même présente peu d’intérêt, mais elle constitue l’étape idéale pour visiter le parc national de Taroko. Hualien dispose d’une importante base militaire, peut-être la plus importante du pays? On comprend aisément que le lieu sur la côte est, à l’abri de la chaîne de montagnes, loin des grandes agglomérations, est le lieu idéal sur le plan stratégique, pour implanter une telle base. Nous avons souvent entendu les chasseurs volés au-dessus de nos têtes. Mis à part cela, la ville n’est pas désagréable. Elle a un côté provincial qui nous a changé de Taipei. Hualien compte un nombre incroyable de restaurants pour une ville de cette taille. Tripadvisor en recense près de 600!

Nous avons dormi 3 nuits à Hualien, de façon à consacrer deux jours au parc de Taroko. Malheureusement, il a plu le second jour et nous avons eu la flemme de sortir en randonnée dans ces conditions. Le bon côté des choses est que nous avions anticipé ce risque la veille, en voyant les prévisions météorologiques. Nous avons donc profité du beau temps pour voir le maximum de choses.

Pour le second jour, j’avais fait la liste des 3 ou 4 choses à voir dans la ville, sans grande conviction. Nous avons commencé par un temple bouddhiste : le hall de méditation Tzu Chi. Nous avons eu dû mal à nous garer dans les alentours. Je me rappelle avoir dit à Elise et aux filles, que nous n’en avions pas pour longtemps: 10-15 minutes peut-être. En fait, je pense que nous y avons passé plus d’une heure et demie. En arrivant dans le hall de ce grand bâtiment, des hôtesses sont venues vers nous avec des grands sourires, nous invitant à nous déchausser pour visiter. Ensuite, elles nous ont proposé de regarder un petit film sur l’histoire de la communauté Tzu Chi, puis de suivre une guide qui parlait un anglais impeccable. Un couple et leur grande fille, avaient déjà débuté la visite. Ils étaient sûrement indiens. Nous avons donc pris la visite en cours. La guide nous a présenté le travail de secours qu’effectue la communauté quand des catastrophes naturelles surviennent dans le Monde. Nous avons découvert un travail impressionnant qui va des premiers secours, à l’assistance alimentaire et médicale, à la construction d’habitats d’urgence, à la reconstruction… La guide nous décrivait avec force détails tout ce travail en s’appuyant sur les panneaux d’exposition présents dans le bâtiment principal. Le lieu était luxueux, l’exposition remarquable par son graphisme et ses photos. Mais la présentation a duré longtemps, très longtemps. Je traduisais un peu pour les filles. Mais elles ont rapidement trouvé que c’était un peu trop long. J’ai cru au début que nos hôtes nous voyaient comme de futurs donateurs. En fait, non. Cette présentation était faite simplement avec fierté, pour le bonheur de faire-savoir et de partager leurs oeuvres. La guide semblait comme habitée. Je suis sorti impressionné par la visite et par la capacité d’empathie que certaines personnes développent. Il était déjà tard, et nous avons arrêté là notre visite de Hualien.

Le hall principal de la communauté Tzu Chi (notez le svastika).

 

La communauté portugaise de Toronto

Il est délicat d’aborder la question du communautarisme dans sa globalité. Le sujet est d’une très grande complexité car il met en jeu des mécanismes multiples (économie, culture, langue, religion, politique, urbanisme, histoire, guerre…). Je me considère trop peu connaisseur de ces phénomènes pour m’autoriser à en parler dans le cadre de ce blog. Je sais qu’en France nous avons coutume d’opposer notre système républicain d’intégration avec le modèle des communautarismes à l’anglo-saxonne. Même si cette opposition me semble en partie fondée, je pense que la réalité est infiniment plus nuancée et que précisément les mécanismes que j’évoquais ci-dessus font qu’il me semble hasardeux de simplifier ainsi. Par ailleurs, il existe des communautés en France, religieuses ou non religieuses. Le territoire français est morcelé. Ainsi, l’écart qui existe, entre l’idéal républicain d’intégration et la réalité, m’invite, en tant que français, a la plus grande modestie sur le sujet.

Ceci étant dit, je voulais dire un mot de cette communauté portugaise que je connais un peu. Tout d’abord, je voulais dire que cette Nation reste à mes yeux une énigme. Comment expliquer que tant de portugais, génération après génération, décident de quitter leur pays pour aller chercher fortune ailleurs? Bien sûr, je comprends la motivation économique. Mais, c’est la proportion qui m’étonne. Même si les chiffres sont à prendre avec beaucoup de prudence, Wikipedia indique que la diaspora portugaise dans le Monde s’élèverait à 82 millions de personnes pour 10 millions d’habitants au Portugal. Il me semble qu’il existe chez les portugais une propension et une capacité à émigrer qui n’existe pas dans la plupart des autres pays. C’est une force indéniable et cela révèle une grande capacité d’adaptation. Il me semble que c’est une immigration qui procède d’une démarche collective. Elle est possible car il existe des liens forts entre les individus d’une même famille, d’un même village, d’une même région, qui me semblent bien supérieurs à ceux qui peuvent exister en France. Il n’est pas aisé de décider de tout abandonner chez soi pour aller s’installer dans un pays dont on ne parle pas la langue. Mais si dans ce pays, il existe une communauté de compatriotes disponibles pour vous accueillir et vous aider à vous installer, les choses sont plus aisées. C’est ainsi que se fait l’émigration des portugais. Ils partent dans un pays où ils vont retrouver des personnes qu’ils connaissent. Et ensuite, eux-mêmes constitueront un pôle d’attractivité pour la famille ou les amis restés au pays.

La plupart des portugais quittent leur pays pour des raisons économiques et avec l’idée de revenir un jour. Cette situation d’émigré est transitoire. L’intégration, l’apprentissage de la langue, l’obtention d’une nouvelle citoyenneté ne sont pas des priorités. Ils sont éventuellement des moyens qui servent l’objectif principal qui est de se constituer une épargne pour préparer le retour. Dans ce contexte, la communauté d’expatriés est primordiale : elle est la principale source d’informations, d’aide. Elle permet également de retrouver, dans l’exil, un morceau du Portugal à travers des symboles et des marqueurs culturels forts : le drapeau, le coq, le pain, les pâtisseries, la cuisine, les jeux de carte, les chaînes de télé, les clubs de football…

La raison économique qui a amené les portugais à quitter leur pays les incite, par ailleurs, à travailler beaucoup pour maximiser l’épargne, et souvent bien au-delà des limites légales. Personnellement, je ne manque pas d’être impressionné par leur courage et leur puissance de travail.

Si l’objectif de départ est de se constituer rapidement une épargne importante pour vivre mieux ensuite au Portugal, les choses ne s’avèrent pas si simples. Les années passent, les enfants grandissent et deviennent progressivement des citoyens du pays d’accueil. Si les enfants sont arrivés très jeunes ou sont nés dans le pays d’accueil, la perspective d’un retour au Portugal peut les rebuter. Au Canada, nous avons ainsi rencontré plusieurs familles où les enfants parlent anglais avec leurs parents parce qu’ils parlent peu le portugais. La question du retour devient alors un dilemme pour les parents. Ce qui était provisoire devient progressivement une situation qui dure. Et si les enfants se marient dans le pays d’accueil et donnent des petits enfants à leurs parents, il est hautement probable que cette situation devienne définitive. Les petits-enfants deviendront de vrais citoyens du pays d’accueil et l’intégration sera ainsi réalisée.

En écrivant ces lignes, je me rends compte que je viens de raconter l’histoire des parents d’Elise et de tant d’autres portugais qui vivent en France. Finalement, ce que j’ai pu observer au Canada ressemble fortement à ce que nous connaissons en France. La seule chose qui me semble différer concerne le statut des immigrés portugais qui vivent au Canada. Beaucoup sont en situation irrégulière. Ils travaillent, consomment, achètent des maisons, leurs enfants vont à l’école… Et pourtant ils ne sont pas en règle sur le plan administratif. Le Canada semble fermer les yeux sur cette situation puisque ces personnes ne sont pas inquiétées par les autorités canadiennes. En revanche, si elles sortent du pays, par exemple pour des vacances au Portugal, elles courent le risque de ne plus pouvoir entrer. Ces portugais sont un peu comme prisonniers au Canada et ressentent encore plus fortement le besoin de se retrouver dans la communauté.

Si certains portugais regrettent d’avoir fait le choix de partir pour le Canada, nous en avons rencontré beaucoup qui étaient très heureux de cette nouvelle vie.